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La réactualisation des perspectives de croissance des économies émergentes change fondamentalement la donne sur les marchés des produits de base. Le boom des produits de base est terminé. L'effondrement des prix observé depuis la reprise des turbulences financières mondiales a mis fin à tout espoir de voir les cours des produits de base se maintenir autour des sommets atteints récemment. Rétrospectivement, la chute brutale de ces prix ne saurait être une surprise : la tourmente financière s'est intensifiée et a gagné les économies émergentes. Il semble désormais inévitable que l'activité mondiale connaisse une forte contraction, et les économies émergentes ou en développement enregistreront à ce titre une croissance inférieure à la tendance en 2009 — au lieu du simple retour à cette tendance escompté dans un premier temps. Les chiffres récents confirment, de fait, la forte décélération de l'activité dans ces pays. Cette réactualisation des perspectives de croissance des économies émergentes modifie fondamentalement la donne sur les marchés des produits de base. Depuis quelques années, en effet, ces pays assuraient l'essentiel de l'accroissement de la demande pour la plupart des produits de base. Des failles apparaissent Les turbulences financières ont accéléré le mouvement de baisse des prix, car les investisseurs ont diminué pour diverses raisons leur portefeuille d'actifs liés aux produits de base. Cette diminution s'est répercutée sur les marchés à terme de ces produits, où les intermédiaires financiers se couvrent contre les risques pris sur le marché hors cote. Le repli de la demande de positions longues sur les contrats à terme a coïncidé avec l'essor de la demande de positions courtes par les producteurs. La tendance au recul des positions longues nettes sur les contrats à terme de produits de base découle également du manque de crédits pour les opérations de prise de risques financée par l'emprunt (conduites sur ces marchés par les fonds spéculatifs, notamment) ainsi que de la préférence croissante de nombreux investisseurs pour la liquidité et de l'appréciation très sensible du dollar en termes effectifs nominaux dans la période récente. Quels facteurs pèseront sur les prix des produits de base ? Le niveau actuel des prix témoigne déjà de l'anticipation d'une croissance mondiale beaucoup plus faible. Néanmoins, l'expérience des épisodes antérieurs de contraction de l'activité dans le monde laisse penser que le mouvement de baisse pourrait encore se poursuivre. À court terme, l'offre de produits de base est en général inélastique par rapport aux prix, et les pressions à la baisse induites par la contraction de la demande dominent en période de fléchissement de l'activité. Quels seront, dans le cadre général ainsi tracé, les facteurs qui pèseront sur l'évolution des prix ? La gravité de la contraction de l'économie mondiale sera l'un d'entre eux. Deux questions se posent : quel effet cette contraction aura-t-elle globalement sur les économies émergentes, et à quel point la demande d'investissements de ces derniers ralentira-t-elle ? Prenons les cours des métaux. La Chine représentait la quasi-totalité de l'augmentation de la demande des principaux métaux depuis un an et demi. Beaucoup dépendra donc de l'impact des contraintes de crédit sur le financement des projets d'investissement et de l'effet de la relance budgétaire sur le développement des infrastructures et le soutien de la demande de métaux. Le tassement de l'offre pourrait aussi dégager une certaine marge de hausse des prix. À court terme, cette possibilité semble valoir surtout pour les produits de base dont la structure d'offre n'est pas concurrentielle. Jusqu'à une période récente, les marchés ont fait peu de cas de la décision récente de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) visant à diminuer la production de pétrole brut de 1,5 million de barils par jour. Fléchissement de la demande de pétrole Ce scepticisme du marché est dû au fait que la demande mondiale de pétrole sera beaucoup plus faible que prévu et se contractera sans doute en 2009, pour la première fois depuis la récession de 1980-82. À moins d'une chute inopinée de la production des pays n'appartenant pas à l'Organisation, les membres de l'OPEP devront probablement diminuer encore leur propre production pour stabiliser les prix. Nous en revenons à la sempiternelle question : la discipline sera-t-elle respectée par les membres de l'OPEP, dont on connait la dépendance vis-à-vis des revenus pétroliers ? Enfin, l'impact du ralentissement attendu de l'activité mondiale sur les prix devrait varier selon les produits de base, qui n'ont pas tous la même élasticité par rapport au revenu. Les prix des denrées alimentaires, en particulier, seront sans doute moins influencés par l'évolution des perspectives de croissance dans le monde. La fin des perturbations de l'offre dues aux aléas climatiques cette année et la levée des restrictions à l'exportation ont été les principaux facteurs de la forte détente des prix des denrées alimentaires, et la baisse des prix de l'énergie amplifiera encore, à terme, ce processus. Cependant, les prix des combustibles et des engrais — qui sont restés élevés jusqu'au milieu de 2008 — et le resserrement du crédit risquent de peser temporairement sur l'offre en 2009. Reports Les prix à terme de nombreux produits de base ont beaucoup moins baissé que leurs prix au comptant ces derniers mois, et se situent désormais bien au dessus de ces derniers. Dans cette situation de « report », on s'attend à ce que les prix augmentent dans les années qui viennent, sans quoi il y pourrait y avoir des arbitrage possibles. De fait, les données empiriques en la matière laissent penser que l'écart actuel entre les prix du pétrole à terme et au comptant donne des indications fiables du sens dans lequel les cours vont évoluer à l'avenir. Le rebond des prix pourrait ne pas refléter seulement la reprise de la demande mondiale. Du côté de l'offre, le faible niveau actuel des prix au comptant ralentira encore le développement des capacités pour de nombreux produits de base. Les projets d'investissement dans des gisements pétroliers ou miniers aux coûts d'exploitation élevés commencent à être abandonnés ou ajournés parce qu'ils ne sont pas rentables aux prix actuels. La question des contraintes de capacité pourrait donc se poser à nouveau pour certains produits de base clés. Quoi qu'il en soit, le rebond des prix ne signifierait pas que ceux-ci retrouveront d'ici peu les pics observés en 2008. Il ne faut pas oublier que leur volatilité est considérable.
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